Fondée en 2016 par Vincent Péquignot, Gamabilis conçoit des jeux vidéo à impact afin d’encourager et d’éveiller les consciences. L’équipe Gamabilis utilise le jeu vidéo dans le but d’avoir un impact positif sur le comportement des joueurs, des collaborateurs et sur la société.
Pour le Journal du Manager, Vincent revient sur le concept de jeu à impact, et nous explique en quoi le jeu vidéo est devenu un outil d’engagement et de communication.
Quelle est l’histoire de Gamabilis ? Pourquoi avoir fondé cette entreprise ?
J’ai fondé Gamabilis parce que je voulais faire manger des brocolis à mes enfants. Objectif ambitieux que je n’ai pas atteint, cependant, en m’intéressant à leurs centres d’intérêt, j’ai remarqué que le jeu vidéo pourrait être un atout de taille pour les convaincre. C’est là que j’ai découvert la puissance des Jeux Vidéo à impact : encourager le changement, changer le regard des joueurs sur le monde qui nous entoure et mobiliser les communautés pour être moteur du changement.
Depuis 5 ans, avec mon associée Marianne Tostivint qui réalise nos jeux, nous abordons les principaux enjeux sociétaux : alimentation durable, diversité et inclusion, transition écologique et climatique. Cette année nous lançons le premier jeu vidéo qui œuvre pour une agriculture plus respectueuse de l’environnement. Ce jeu se nomme Roots Of Tomorrow.
Qu’est-ce que le jeu vidéo à impact ? Quelles sont les différences avec le jeu vidéo « traditionnel » ?
Le jeu à impact reste tout d’abord un jeu vidéo qui se veut fun. Contrairement à un jeu vidéo classique, c’est la finalité, le but du jeu qui va changer : encourager le changement des comportements, contribuer à l’intérêt général, transformer des expériences relationnelles avec leurs communautés (collaborateurs, clients…).
Nous voulons impulser un changement dans la société grâce à un levier pédagogique et interactif qu’est le jeu vidéo. Nos clients sont satisfaits, car le jeu vidéo a un fort impact sur les joueurs.
Quelles sont les thématiques abordées dans vos jeux ?
Toutes sortes de thématiques, de la plus globale à la plus spécifique. Nous avons commencé par des jeux touchant au sujet déjà vaste de l’alimentation pour nous tourner vers des thèmes plus généraux : la prévention santé et sexualité, la transition agroécologique, l’innovation, etc. Et bien d’autres !
Lors de la conception de vos jeux, êtes-vous accompagnés par des professionnels liés aux sujets que vous traitez ?
Oui bien sûr ! Pour chaque sujet abordé nous nous entourons d’experts (nutritionnistes, chercheurs, anthropologues, écrivains…). Par exemple sur Roots of Tomorrow, inventons l’agriculture de demain, nous sommes accompagnés par un Conseil Scientifique présidé par Christian Huyghe, Directeur scientifique Agriculture de l’INRAE.
À qui s’adressent vos produits ? Dans un premier temps, qui sont vos clients ? Et in fine, qui sont vos joueurs ?
Nos clients sont donc des régions, les collectivités, les associations pour faire passer un message sociétal, mais aussi les grands groupes et des entreprises qui veulent accompagner les transformations en cours. L’avantage du jeu vidéo est que selon le public ciblé, il peut être adapté à tous. Le but étant que l’on en retienne une expérience. Donc les joueurs peuvent être très variés.
Comment fonctionne votre business model ?
Nos clients sont des organisations publiques et privées qui veulent encourager le changement pour les communautés internes ou externes via le levier du jeu vidéo.
Pour cela, nous leur proposons des systèmes de licences en « one shot » ou à contrario des systèmes d’abonnements quand le jeu se prête à la récurrence.
Le jeu vidéo est-il devenu un outil de communication efficace pour répondre aux enjeux de notre société ? Quel impact peut-il avoir socialement ?
Oui, le jeu vidéo est redoutablement efficace ! Il permet une vraie expérience immersive. Dans un jeu vidéo, il est possible de se tromper sans conséquences graves, et en retenant davantage de choses qu’en regardant un documentaire par exemple, car on reste acteur de ses choix.
Dans le cadre de notre programme de R&D, nous avons lancé une étude au croisement entre de la sociologie et de la psychologie cognitive sur l’impact de nos jeux. Ce travail s’appuie sur une thèse CIFRE réalisée par Hélène Birlouez au sein du laboratoire de sociologie (CERLIS), sous la direction d’Emmanuelle Savignac, et avec la participation d’Hamid Bessaa (chercheur en psychologie cognitive à la Cité des Sciences et de l’Industrie).
Pourquoi avoir fait le choix de lancer il y a quelques mois une campagne Ulule ? Quel est le bilan de cette expérience ?
Notre but avec cette campagne était avant tout de faire connaitre les enjeux de notre jeu Roots Of Tomorrow et de générer une première communauté. La somme récoltée servira à développer un scénario agriculture urbaine et ainsi à enrichir le jeu et son impact auprès de différents publics.
Le bilan de cette expérience est très positif. Cette expérience est très prenante et il faut la vivre à 200 % si l’on veut atteindre son objectif. L’avantage c’est que nous avons beaucoup appris de ce crowdfunding en matière de cible, de message à faire passer, de crédibilisation et d’aventure !
Que retenez-vous de cette aventure entrepreneuriale ?
Je retiens que l’entrepreneuriat est une école de la patience, les choses mettent du temps, toujours plus de temps que ce que l’on aimerait. Ce qui peut sembler peu intuitif c’est qu’il faut à la fois être persévérant — notamment dans les phases de commercialisation — mais aussi être prêt à faire évoluer son offre en fonction des retours des clients. C’est-à-dire trouver un équilibre entre la vision que l’on peut avoir de son produit et les attentes du marché. Enfin, le plus important, même si cela est classique à dire, c’est de bien s’entourer. C’est vraiment un point majeur lorsque l’on crée son entreprise, c’est ce qui fait la différence in fine.
Quelles sont vos ambitions pour Gamabilis ? Avez-vous prévu de développer des jeux sur d’autres enjeux sociétaux ?
Nous aimerions que notre jeu Challenger Deep sur qui accompagne la transformation des entreprises et notre jeu Big Little Bias qui nous apprend à changer notre regard sur la diversité soient adoptés par de nombreuses entreprises afin de les aider dans la transformation de leurs organisations.
Notre ambition est de continuer à grandir et devenir LE studio de référence dans l’univers des jeux à impact. Également bien sûr, faire grandir l’équipe et probablement nous développer à l’étranger.
Bref, continuer à faire connaître nos jeux, créer des communautés de joueurs, renforcer l’équipe avec des passionnés de jeux à impact et s’attaquer à des sujets encore plus ambitieux tels que le changement climatique.
Nos remerciements à Vincent Péquignot, fondateur et CEO de Gamabilis.
Propos rapportés par l’équipe de manager.one.