Budget Insight, leader de l’Open Finance et l’Open Banking en France : Rencontre avec son président et cofondateur, Romain Bignon

Romain Bignon, Président et CEO de Budget Insight, le leader l'Open Finance et l'Open Banking en France

Fondée en 2012, Budget Insight est le leader de l’agrégation bancaire en France et un acteur incontournable de l’agrégation des services financiers en Europe. La startup développe et commercialise auprès des banques des applications de gestion automatisée des finances personnelles. Ainsi, elle offre aux acteurs traditionnels comme aux fintech, une triple expertise.

Pour le Journal du Manager, Romain Bignon, Président et cofondateur de Budget Insight, nous raconte le parcours de cette belle entreprise.

Quelle est l’histoire de Budget Insight ? Pourquoi avoir fondé cette activité en 2012 ?

Quelques années avant de fonder Budget Insight, j’ai développé un framework open source nommé Woob (Web Outside of Browsers) qui a posé les pierres du scraping, à savoir le fait d’automatiser les interactions avec des sites web. Les typologies de connecteurs comprenaient les sites de vidéo, de sous-titres, de recherche d’emplois, d’appartement, ou encore… de banques.

Ayant l’envie de créer une activité autour de Woob, j’ai rencontré Clément Coeurdeuil. Nous avons créé ensemble la société Budget Insight.

Au départ, l’idée était de proposer un PFM (Personal Finance Manager), à savoir une application de gestion des comptes bancaires pour les particuliers. Très vite, étant en auto-financement, nous nous sommes rendu compte que la valeur que l’on pouvait apporter provenait surtout de la récupération de données plutôt que sur son exploitation sur une verticale donnée.

Désormais, nous servons par API tout un ensemble de verticales, de la comptabilité à la gestion de patrimoine en passant par les systèmes de cashback, de BNPL ou encore de wallets. Et de nouveaux cas d’utilisations émergent régulièrement, l’écosystème de la fintech étant très dynamique.

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Comment fonctionne l’API développée par Budget Insight ?

À partir du moment où vous créez un compte sur la console développeurs, il suffit d’intégrer dans votre parcours notre écran de consentement, sur laquelle l’utilisateur peut choisir sa banque, s’authentifier auprès d’elle, et valider les comptes qu’il souhaite partager. Dès lors, vous recevez sur les liens de rappel HTTP que vous avez configurés l’ensemble des données, de manière quotidienne chaque fois que la connexion avec la banque est établie.

Pour l’initiation de paiement, le fonctionnement est similaire. Après la validation par l’utilisateur, vous êtes informé de la bonne réalisation du virement.

Comment avez-vous conçu ce produit ? Avez-vous été accompagné dans cette aventure ?

Nous avons conçu l’API initialement de manière opportuniste, répondant aux besoins de différents acteurs de la comptabilité ou de la gestion d’entreprise qui nous connaissaient. L’offre s’est construite progressivement, et nous avons appliqué les bonnes pratiques de conception d’API du marché sur les autres secteurs d’activités.

Nous l’avons développée en propre, et nous sommes assez fiers de dire que l’ensemble des développeurs sont nos salariés. Nous ne faisons pas appel à des ESN ou de l’outsourcing, nous avons une réelle expertise dans le domaine du scraping et de l’exposition d’API, portée par l’équipe talentueuse que nous avons réussi à constituer.

En quoi Budget Insight se démarque-t-elle des autres fintech présentes sur le marché ?

Nous avons été précurseurs sur ce métier. En 2013, nous étions les seuls en France et très peu en Europe à proposer ce service. Beaucoup d’acteurs nous ont suivi, d’une part ceux qui comme nous avaient débuté par le PFM sans arriver à en tirer de revenus, d’autre part de nouveaux entrants qui ont découvert nos services par la lumière de la PSD2 (Payment Services Directive 2, directive européenne votée en 2017), qui a créé un cadre réglementaire autour de notre activité.

Le fait d’avoir commencé plusieurs années avant les autres nous a toujours donné une longueur d’avance. Nous avons été les premiers à proposer l’initiation de paiement.

Par ailleurs, si les nouveaux entrants se contentent du périmètre de la PSD2 (qui se concentre sur les comptes de paiement), nous offrons une vue des actifs beaucoup plus large, puisque non seulement nous permettons de récupérer tous les produits bancaires (crédits, comptes titres, assurances vie, etc.), mais nous sommes aussi connectés aux assureurs et aux plateformes de cryptomonnaie.

Enfin, nous apportons également une connectivité vers les impôts, ou différents fournisseurs en vue de récupérer les factures.

Comment expliquez-vous le succès de Budget Insight ?

L’écosystème des fintech est en plein boom. Le monopole bancaire a été cassé, et ces nouveaux acteurs proposent des services innovants qui répondent aux exigences des particuliers et des professionnels. Mais pour proposer ces services, elles ont besoin d’être connectées au système bancaire traditionnel. C’est justement ce que nous leur apportons.

D’une manière générale, on se considère comme une infrastructure pour ces acteurs, leur permettant de développer leurs offres.

Les banques sont également de la partie ; la plupart d’entre elles ont décidé de réagir face à la montée des fintech et cherchent elles aussi à innover, et pour ce faire passent par nos services.

Quelle est votre place à l’international ? Quels territoires souhaitez-vous à présent conquérir ?

Aujourd’hui nous couvrons 18 pays, principalement l’Europe de l’Ouest (France, Belgique, Luxembourg, Italie et Espagne, et bientôt le Portugal).

Nous comptons ces prochaines années conquérir toute l’Europe !

Vous avez levé 35 millions de dollars ce lundi 4 avril 2022. À quoi ce montant va-t-il servir ?

Justement, le marché de l’open banking est très dynamique, et s’il y a beaucoup de champions nationaux, nous pensons que le marché va se consolider autour de quelques acteurs européens.

C’est la raison pour laquelle nous avons fait entrer au capital le fonds d’investissement PSG Equity. Non seulement les capitaux qu’ils injectent vont servir notre croissance organique, mais une poche conséquente sera également allouée pour servir une stratégie d’acquisition.

Quelles leçons retenez-vous de cette aventure entrepreneuriale ?

Très honnêtement, je ne m’attendais pas à un tel succès. Lorsqu’on a débuté, nos ambitions étaient assez humbles, nous n’avions pas levé de fonds, et nous avons construit la société petit à petit. L’explosion est arrivée assez soudainement à partir de 2015, lorsqu’une nouvelle vague de fintech a surgi, que nous avons signé d’importants contrats avec des banques majeures de la place, et par l’entrée en vigueur de la PSD2.

Il est apparu dès lors que nous ne pouvions pas nous contenter de rester la petite TPE mais que pour mieux servir la forte demande, il nous fallait passer à la vitesse supérieure.

Ce que j’en retiens, c’est que la pente est rude, c’est beaucoup d’énergie à dépenser, mais aussi beaucoup de créativité, des coups durs et de belles victoires, mais surtout la fierté de constituer une équipe fabuleuse avec qui on partage l’histoire.

Comment imaginez-vous cette activité dans 5 ans ?

Pour moi, une consolidation va se faire au niveau européen, car la réglementation est européenne et que la plupart de nos clients ont ou veulent avoir une envergure européenne.

L’activité va évoluer vers davantage de données collectées, mais aussi sur de l’enrichissement de données, car on peut en extraire énormément de valeur et permettre de créer encore plus de nouveaux services. Et ce toujours avec le consentement de l’utilisateur final, car il est propriétaire de ses données. Venant de l’univers du logiciel libre, c’est un principe qui nous tient à cœur. Comme validé par le GDPR (Règlement général sur la Protection des Données), notre mission est justement de lui rendre le contrôle sur ses données pour qu’il puisse en disposer et les partager facilement avec les services auxquels il souscrit.

En outre, je pense que nous aurons de plus en plus notre rôle à jouer dans l’interconnexion entre le monde bancaire et le monde des cryptomonnaies, qui est en plein essor et qui, de la même manière, aura besoin de conquérir des utilisateurs moins initiés.

Auriez-vous des conseils à donner aux lecteurs du Journal du Manager souhaitant se lancer dans l’entrepreneuriat ?

Le premier conseil que je donnerais est de trouver un associé avec qui vous êtes complémentaire. Plusieurs entrepreneurs ont fait le choix de partir seul. Je trouve cela très respectable, mais je pense qu’il est important d’avoir un alter ego avec qui partager l’aventure, qui vous soutient dans les moments difficiles, et vice versa.  

Mon deuxième conseil : n’ayez pas peur de faire des erreurs. Vous allez en faire, mais elles sont source d’enseignements. L’important est d’être orienté vers des solutions et de tirer les conclusions pour avancer. Si vous êtes entrepreneur, c’est que vous n’avez pas d’aversion au risque, il n’y a rien de pire, surtout dans les premières phases, que d’être prudent.

Enfin, soyez exigeants en matière de recrutement, non seulement sur les compétences, mais surtout sur la personnalité. Le succès de votre entreprise tient sur eux et leur capacité à travailler ensemble. Une bonne attitude collective est bénéfique, mais de la politique ou du mauvais esprit peut pourrir complètement la cohésion et la motivation.

Et célébrez ! Le plus important dans l’entreprise n’est pas le résultat financier, mais l’atmosphère que vous créez au sein de votre équipe. Il faut que vous vous amusiez, que votre équipe s’amuse, et que vous passiez des moments agréables ensemble. Réussir à trouver un marché, à développer un nouveau produit, et à générer du revenu, est suffisamment dur et intense pour que vous ne vous accordiez pas en contrepartie du bon temps tous ensemble. Il ne s’agit pas de juste acheter un babyfoot comme beaucoup de startups ; soyez sincères !

 

Nos remerciements à Romain Bignon, Président & cofondateur de Budget Insight.
Propos rapportés par l’équipe de manager.one

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