Paul Lê a co-fondé en 2015 la Foodtech La Belle Vie, un service de livraison à domicile de produits frais et d’épicerie. La promesse : des courses livrées en 1 heure dans la capitale, et un catalogue de produits de haute qualité.
En mai dernier, La Belle Vie a levé 11,6 millions d’euros pour poursuivre sa croissance sur le territoire français. À cette occasion, nous avons invité sur le Journal du Manager son co-fondateur. Il est revenu sur son parcours, les enjeux du secteur de la Foodtech, ainsi que ses ambitions pour La Belle Vie.
Pouvez-vous nous raconter l’histoire de La Belle Vie, depuis sa création en 2015 ? Comment cette idée vous est-elle venue ? Quelle clientèle ciblez-vous ?
Nous nous sommes lancés à deux en 2015.
L’idée est venue de mon associé, qui appréciait bien manger et cuisiner. Il rencontrait à l’époque une frustration : les services de livraison de courses n’étaient pas satisfaisants. Livraison onéreuse ou compliquée, manque de choix, peu de produits frais et de qualité…
Nous avons remarqué en parallèle que la Foodtech comprenait de nombreux sites de recettes de cuisine. Mon associé m’a alors proposé d’allier les deux : les recettes et les courses. L’utilisateur n’aurait qu’à cliquer sur la recette pour recevoir les produits requis. Il y a 6 ans, personne ne proposait ce type de service.
J’ai très vite adhéré à l’idée. Nous ciblons aujourd’hui les personnes vivant en centre-ville, aimant la cuisine et les bons ingrédients, mais ayant peu de temps pour faire leurs courses. Nous proposons depuis 5 ans des produits frais (primeur, boucherie) mais également des produits du quotidien de marques nationales.
On vit aujourd’hui dans le monde de l’entertainment. Le plaisir des courses que l’on rencontrait dans les hypermarchés il y a 40 ans a été remplacé par d’autres plaisirs, comme les écrans. Les courses sont maintenant perçues comme une contrainte.
La livraison rapide et à la demande permet de retrouver le plaisir de faire ses courses, notamment dans la découverture des goûts et des produits.
Vous promettez une livraison en 1h à Paris intramuros et 3h dans la petite couronne. Comment livrez-vous en si peu de temps ?
Nous maîtrisons aujourd’hui toute notre logistique. Nous animons des entrepôts urbains en périphérie, très proches du domicile de nos clients. Nous gérons ainsi 7 000 références dont la moitié sont des produits frais voire vivants, ce qui est particulièrement complexe.
Nos entrepôts sont gérés par un warehouse management system.
Nous sommes également particulièrement attentifs à la gestion de la livraison, qui doit être rapide, peu onéreuse et fiable. C’est l’expérience qu’attendent nos clients.
La livraison rapide de produits très frais et de qualité est notre élément différenciateur devant de grandes entreprises telles qu’Amazon.
Quel est le coût du service pour vos clients ?
Le minimum de commande en Île de France est de 25 euros, pour des frais de livraison à 3,90 euros. Les frais de port sont gratuits à partir de 40 euros.
Pouvez-vous expliquer à vos lecteurs ce que signifie le terme « FoodTech » ?
La Foodtech symbolise l’alliance de deux savoirs : la nourriture et la technologie. La question est la suivante : comment la technologie peut-elle aider le secteur de la Food ?
Quels obstacles se sont dressés tout au long de votre parcours entrepreneurial ? Quelles difficultés les entreprises de la FoodTech peuvent-elles rencontrer ?
Lancer une start-up représente beaucoup de difficultés. Mais la difficulté majeure est sans doute de trouver les bons collaborateurs. Il n’y a rien de plus difficile pour une start-up que d’embaucher.
On cherche des personnes brillantes mais cela ne fait pas tout. Elles doivent aussi pouvoir s’imbriquer dans des équipes déjà en place. Pour que cela fonctionne, tout le monde doit être aligné sur la même vision et le même objectif.
La Belle Vie a connu, depuis sa création, un succès grandissant sur un marché pourtant concurrentiel. Comment pouvez-vous expliquer cette réussite ?
La réussite tient à des choses assez simples. Pour nous, c’est d’abord proposer les bons produits et garantir une offre complète. C’est une grande difficulté d’avoir autant de produits et les gérer.
La réussite passe aussi par le respect de notre promesse : une logistique forte. Recevoir de bons produits en temps et en heure est une grande satisfaction pour nos clients.
Quel a été l’impact de la crise du Covid-19 sur votre activité ? Quels aménagements avez-vous dû opérer ?
De manière générale, pour garantir une logistique performante et évoluer, il faut accepter de se remettre sans cesse en question et se réinventer.
Lors de la crise du coronavirus, nous avons mis en place des aménagements internes, tant pour les entrepôts que pour notre logiciel. Nous avons réussi à absorber 4 fois plus de volume en 2 semaines grâce à des aménagements très concrets : nouveaux équipements, nouveaux chemins de picking, nouveaux plannings de réassortiment des stocks, etc. Tout a été repensé pour pouvoir absorber le pic de commandes.
Cette crise nous a bien sûr fait évoluer beaucoup plus rapidement. Au début de la crise, nous avons dû faire un choix : fermer l’entreprise, ou bien continuer à accepter les commandes et assurer le pic de la demande. Même si nous avons dû dégrader quelque peu le service (avec une livraison plus longue notamment), notre clientèle s’est agrandie et nous avons beaucoup appris de cette expérience. Nos clients ont vraiment apprécié que nous maintenions le service.
Vous venez de lever 11,6 millions d’euros. À quoi cette levée de fonds va-t-elle permettre ? Quels sont vos objectifs à moyen et long terme ?
Cette levée de fonds va tout d’abord nous permettre d’avancer et de prendre des parts de marché au-delà de l’Île de France. Nous sommes déjà présents partout en France en 24h, et nous souhaitons d’ici la fin de l’année proposer la livraison « same day », c’est-à-dire une livraison le jour même.
Deuxième axe de développement : continuer à structurer notre entreprise en allant chercher les meilleurs talents.
Et enfin, communiquer. Nous avons très peu communiqué depuis la création de l’entreprise, puisque le bouche-à-oreille a très bien fonctionné. À présent, nous souhaitons capter une nouvelle clientèle, notamment grâce à la publicité.
Vous déclarez souhaiter devenir « le leader français de la livraison de courses ». Quelle stratégie d’acquisition et de fidélisation poursuivez-vous pour atteindre cet objectif ? Comment se démarquer, en 2020, des grands noms de la distribution ?
La Belle Vie se démarque d’une part par son efficacité logistique (tout le monde ne peut pas faire cette promesse de livraison ultra rapide !), et d’autre part par la qualité de son catalogue.
Comme évoqué précédemment, nous souhaitons communiquer davantage et utiliser la publicité.
Côté fidélisation, je crois beaucoup en la fidélisation par la preuve. Nous promettons une livraison rapide et efficace à nos clients, et la qualité est au rendez-vous. Nos clients sont donc nombreux à revenir faire leurs courses sur notre site.
Auriez-vous des conseils pour nos lecteurs désireux de se lancer dans l’aventure start-up ?
Bien s’associer est primordial. Tout l’enjeu est de trouver quelqu’un qui nous complète bien. Je ne parle pas que des compétences, mais aussi des qualités humaines. Il faut également bien dissocier les rôles de chacun.
Ensuite, il ne faut pas hésiter à faire le maximum d’itérations de son produit, jusqu’à trouver sa niche. Ce n’est pas grave, au départ, de changer d’avis et de positionnement. Certes, on risque de décevoir certaines personnes, mais on va aussi séduire un nouveau type de clientèle et construire quelque chose de plus fort et de plus rentable.
Enfin, il faut veiller à ne pas être trop dogmatique.
Nos remerciements à Paul Lê, co-fondateur de La Belle Vie.
Propos rapportés par l’équipe de manager.one.