Fondée en 2021, TerraTerre by Agoterra est une entreprise à mission avec des objectifs sociaux et environnementaux ambitieux. Elle accompagne les entreprises qui souhaitent entreprendre une action climat avec un fort impact local et social, en soutenant les agriculteurs de leur territoire à passer à une agriculture régénératrice et bas-carbone.
Pour le Journal du Manager, Mathieu Toulemonde nous raconte son aventure entrepreneuriale avec TerraTerre (by Agoterra).
Pouvez-vous revenir sur votre parcours professionnel et entrepreneurial ? Quelles sont les grandes étapes ?
J’ai grandi dans le Nord, et après un passage à Grenoble pour mon école de commerce, j’ai rejoint Agorize, en tant qu’un des tous premiers collaborateurs.
Pendant près de 10 ans, j’ai participé au développement de cette entreprise spécialisée dans le lancement de concours en ligne entre talents (étudiants, développeurs, startups) et entreprises. Puis, j’ai pris la tête du pôle Asie que j’ai monté et développé jusqu’à atteindre 35 collaborateurs de 18 nationalités sur 3 villes : Hong Kong, Singapour et Tokyo.
C’est en 2020, en reprenant contact avec la ferme familiale basée à Villeneuve-d’Ascq que nous avons décidé de passer en agriculture biologique. Je me suis rendu compte des défis auxquels font face les agriculteurs qui veulent changer leurs pratiques. À savoir la baisse de rendements, les investissements en temps et en argent, les risques liés à la transition, etc.
C’est là que l’idée de TerraTerre by Agoterra est née : accompagner techniquement et financièrement les agriculteurs dans leur transition sur 5 ans pour un monde fertile et bas-carbone. Pour cela, nous proposons à des entreprises engagées dans une transition bas-carbone de soutenir les agriculteurs situés à moins de 100 km de leurs sites. Cela via des crédits carbone certifiés.
En quelques chiffres, TerraTerre by Agoterra c’est :
- Une dizaine de collaborateurs basés à Lille, Lyon et Paris
- Près de 2000 agriculteurs engagés en France et en Europe avec nos partenaires agricoles
- Plus de 50 entreprises clients dont JCDecaux, Dior Parfum, Allianz, Chloé, Banque Populaire, Innocent, Kronenbourg…
- Un impact de 45 000 t de CO2 stockés ou évités grâce à nos actions.
Justement, comment ce projet est-il né ? Quel a été le déclic ?
En 2019, j’ai voulu faire « un truc bien » pour la planète. J’ai donc planté 1000 arbres en Inde pour compenser nos émissions résiduelles.
Après quoi, j’ai reçu un certificat papier par la Poste, mais il n’y avait aucune information sur les arbres plantés, la localisation, le suivi et la certification. J’ai trouvé cela léger, très léger…
Puis, au moment de passer la ferme familiale en agriculture bio, je me suis rappelé cette frustration avec une idée toute simple : relocaliser la finance carbone au profit de la transition de nos agriculteurs.
J’ai donc creusé le sujet :
- 3 % des crédits carbone achetés en France en 2021 ont soutenu des projets localisés en France.
- 88 % des crédits vendus sont issus de projets forestiers ou projets d’énergie renouvelable.
- Seulement 1 % pour les projets d’agriculture durable, alors que nos sols agricoles représentent le 2e puits de carbone en Europe.
C’est ainsi que j’ai lancé TerraTerre by Agoterra. L’objectif était de donner des moyens aux milliers d’agriculteurs en France et en Europe qui sont prêts à changer leurs pratiques.
Pouvez-vous présenter votre activité ainsi que le concept de TerraTerre by Agoterra?
TerraTerre by Agoterra a une seule mission : accélérer la transition agroécologique.
Actuellement, l’agriculture est responsable de 20 % des émissions de GES mondiales. Elle n’est pas du tout adaptée aux évolutions climatiques à venir alors que l’on pourrait transformer la majorité des sols agricoles en puits de carbone !
Notre métier est donc d’aider les entreprises engagées à agir concrètement pour le climat au moyen de crédits carbone. Des crédits que l’on mettra au service de la transition d’agriculteurs locaux vers un mode de production régénérateur.
Concrètement, une entreprise engagée dans une démarche climatique conforme aux efforts de Paris doit d’abord mesurer ses émissions de CO2, les réduire au maximum puis compenser celles qui sont inévitables en achetant des crédits carbone qui permettent de financer des projets de capture et de stockage de carbone. Nous proposons donc à nos clients de contribuer à la neutralité carbone mondiale de façon hyper locale, en achetant des crédits carbone qui vont servir la transition agroécologique d’agriculteurs de leur territoire.
Une plateforme de suivi dédiée, des visites de fermes et un accompagnement sur mesure permettent de rendre concrète cette étape essentielle de toute stratégie bas-carbone qu’est la contribution à la neutralité mondiale.
Qu’est-ce que l’agriculture régénératrice ? Quels en sont les pratiques et les avantages ?
En fait, l’agriculture du 21e siècle est dans une situation tout à fait paradoxale. C’est à la fois l’un des premiers postes d’émissions de GES au monde et un formidable outil de lutte contre le changement climatique si l’on parvient à transformer les sols en puits de carbone.
Le but est donc de développer le plus possible l’adoption de pratiques régénératrices. Et cela pour deux raisons. Tout d’abord, elles permettent de rendre l’agriculture plus résiliente aux aléas environnementaux (car on restaure la santé des sols en augmentant la teneur en matières organiques des sols et en améliorant leur structure). Ensuite, elles permettent de décarboner fortement l’ensemble du secteur et de séquestrer du carbone atmosphérique. On appelle cet ensemble de pratiques l’agriculture régénératrice.
D’ailleurs, on a écrit un article complet à ce sujet ici.
Selon vous, comment le secteur va-t-il évoluer ces 10 prochaines années ?
Je pense que la pression du grand public et des investisseurs va s’accentuer sur les entreprises afin que ces dernières agissent pour limiter les effets du changement climatique et régénérer nos écosystèmes naturels. En ce sens, je trouve que le mécanisme des crédits carbone est particulièrement adapté pour rediriger une partie des flux monétaires vers des projets ayant un impact environnemental mesurable, traçable et vérifiable. Mais il me semble important de mettre en place des garde-fous importants. Cela afin que « finance carbone » rime avec un réel impact.
Pouvez vous nous donner un exemple d’entreprise que vous accompagnez dans leur contribution carbone ?
On peut par exemple citer Allianz Travel qui a choisi de renforcer son engagement RSE en contribuant à des projets bas-carbone et de biodiversité.
Dans le cadre des missions sanitaires internationales d’urgence, l’avion est souvent le seul moyen de transport envisageable pour rapatrier les voyageurs de manière rapide et sécurisée. Allianz Travel a mesuré ces émissions de CO2 qui sont incompressibles, car inévitables, et a donc souhaité contribuer à des projets bas carbone à hauteur de 20 % de ce volume d’émissions. Avec TerraTerre by Agoterra, Allianz Travel soutient deux agriculteurs français dans leur transition agroécologique, à Beauce-la-Romaine et Arrou.
Ces agriculteurs mettent en place des pratiques durables, qui permettront sur les 5 années du programme de réduire et/ou séquestrer l’équivalent de 1720 t de CO2 correspondant à 20 % des émissions réalisées en 2022 dans le cadre des prestations d’assistance médicale d’Allianz Travel. En soutenant des projets locaux, l’entreprise contribue également à la génération de nombreux bénéfices environnementaux (préservation de l’eau, augmentation de la biodiversité, amélioration de la fertilité des sols…) et sociaux contribuant à la redynamisation de nos territoires (emploi et dynamisme local, investissements locaux…).
Quelles sont vos ambitions pour TerraTerre ? Souhaitez-vous pénétrer de nouveaux marchés ?
Oui, en effet, notre mission est d’accélérer la transition vers une agriculture durable et bas-carbone. Nous souhaitons donc proposer une solution de contribution adaptée à tous les budgets et dans le plus d’endroits possible.
Ainsi, nous avons lancé le mois dernier une offre de co-financement à destination des TPE/PME pour soutenir des projets de transition agroécologique et contribuer à la neutralité carbone mondiale à partir d’un budget de 10 t CO2eq.
Nous nous développons également à l’international. Aujourd’hui, nous proposons des projets en France bien sûr, mais aussi en Belgique et en Allemagne. Nous avons aussi l’intention d’accélérer cette expansion, mais toujours avec une approche « multi-locale ». C’est-à-dire à moins de 100 km des sites des entreprises partenaires.
Nos remerciements à Mathieu Toulemonde, fondateur & CEO de TerraTerre by Agoterra.
Propos rapportés par l’équipe de manager.one