Fondée en 2019, Seeqle est le leader du recrutement programmatique basé sur l’IA. La startup développe une solution intelligente d’acquisition candidat qui permet aux écoles, aux entreprises et aux agences de générer 5 fois plus de candidats qualifiés.
Pour le Journal du Manager, Jean Eudes Yahouedeou nous raconte le parcours de l’IA de recrutement programmatique élue meilleure innovation RH 2023 dans la catégorie Recrutement et Marque Employeur.
Pouvez-vous revenir sur votre parcours professionnel et entrepreneurial ?
Il faut savoir que je viens d’une famille d’entrepreneurs alors j’ai toujours baigné dans l’entrepreneuriat. J’ai fait mes différentes formations dans des écoles de commerce. Ensuite, en sortant des études en 2014, j’ai lancé une première solution qui était le CV Multimédia. Elle visait à valoriser les compétences des chercheurs d’emploi à travers des vidéos et l’analyse de la personnalité. C’était ma première épopée entrepreneuriale. En parallèle, j’ai travaillé chez Yupeek, une startup concurrente de Job Teaser, où j’étais responsable des partenariats.
Avec le temps, CV Multimédia a pris de l’ampleur. Nous avons fait un partenariat officiel avec Pôle emploi, ce qui a amené énormément de candidats sur la plateforme. C’était gratuit et ultra-prometteur, mais on avait du mal à monétiser. C’est là que j’ai eu un déclic. Pourquoi ne pas utiliser les données récoltées à partir de cette expérience pour faire un algorithme capable de créer des audiences marketing RH afin de cibler les candidats correspondants ?
En 2018, nous avons travaillé sur le produit et en 2019, nous avons présenté le projet Seeqle à Facebook. Ils l’ont trouvé très intéressant et nous ont intégrés dans leur programme d’accélération pendant 6 mois. Début 2020, nous avons réalisé notre première levée de fonds avec DBA, un pré-seed de 350 k€. Après quoi, il y a eu le COVID, nous avons alors pris le temps de travailler le projet. Durant cette période, nous nous sommes rendu compte que nos datas pouvaient également convenir au secteur de la formation. En 2021, nous avons lancé la commercialisation et depuis nous sommes en croissance constante. D’ailleurs cette année, nous venons d’atteindre le million d’ARR.
Qu’est-ce que Seeqle, et comment fonctionne la technologie mise au point par vos équipes ?
Seeqle est une solution qui permet d’automatiser l’acquisition candidat. Nous utilisons l’IA pour cibler les candidats pertinents en analysant plus de 300 000 points de données RH. Ces données peuvent correspondre au niveau d’éducation, au domaine de formation, aux anciens emplois, à leurs données démographiques, leurs intérêts personnels, etc. Tous ces critères sont combinés pour créer une sorte de profiling et cibler automatiquement ces candidats en leur diffusant des offres d’emploi et de formation via la publicité en ligne un peu partout sur internet.
Comment le secteur du recrutement a-t-il accueilli votre solution ?
La particularité de Seeqle, c’est que c’est une solution technologique. Dès lors, beaucoup d’acteurs peuvent en bénéficier s’ils décident de profiter de l’innovation. Nous avons donc été plutôt bien accueillis puisqu’on répond à la problématique de recrutement de façon globale. C’est une problématique majeure face à laquelle toutes les entreprises sont confrontées. D’ailleurs, cela va en s’accentuant à cause de plusieurs facteurs, notamment la perte de près de 500 k actifs en France chaque année, la hausse des offres d’emploi, le freelancing qui vient concurrencer l’emploi classique, le changement de mentalité des candidats, etc.
Il y a un vrai changement d’équilibre. Aujourd’hui, les entreprises savent qu’elles doivent se démarquer pour attirer les candidats. Il ne suffit plus d’appliquer la technique du post and pray, c’est-à-dire : « je poste et j’attends ». Compte tenu de cette problématique, nous avons eu un bon accueil. Le plus difficile était plutôt de réussir à toucher de grands comptes, car ils faisaient partie de notre stratégie pour accélérer très rapidement le côté data. Ce n’était pas un choix facile, mais il a porté ses fruits étant donné qu’aujourd’hui, nous sommes en avance sur le marché.
Globalement, nous avons été bien accueillis. Nous sommes même présents dans 8 pays et nous avons des clients à l’international. Parmi eux, je peux citer Open Classroom (formation en ligne), Vestas (industrie), Accord (hôttelerie), LCL (banque) Sephora (retail), Burger King (restauration), etc.
Où en êtes-vous dans le développement de ce projet ? Comment comptez-vous financer l’activité de Seeqle ?
Aujourd’hui, nous avons la chance d’avoir trouvé assez rapidement un business model hybride très efficace. Il se base à la fois sur l’abonnement mensuel et une commission sur les dépenses budgétaires des campagnes. Cela nous permet d’être flexibles, mais aussi de financer notre activité en bootstrapping comme nous le faisons depuis la création de Seeqle. En d’autres termes, nous avons fait deux ans et demi de croissance organique et nous sommes rentables. Maintenant, pour encore accélérer la croissance (+ 500 % l’année dernière), nous venons d’ouvrir notre levée de fonds. Elle se compose de façon hybride avec une poche en financement participatif et une plus grande poche réservée aux professionnels de l’investissement.
Quelle est la place du financement participatif en France ? Comment cela a-t-il évolué ces 10 dernières années ?
Le financement participatif a connu une belle évolution en France ces dernières années. C’est devenu un moyen populaire pour les startups de financer leur croissance, de lever des fonds et surtout d’impliquer leur communauté dans les projets. Bien sûr, il existe différents types de financement participatif. D’une part, le crowdfunding classique qui consiste à financer la fabrication d’un produit.
D’autre part, il y a le crowdequity qui est accessible sur Tudigo. Ce sont des actions de la société qui sont vendues. Cela implique d’autres contraintes comme le fait de compléter un profil sur la plateforme. Par ailleurs, il y a toute une analyse qui est faite par les analystes de Tudigo. Ces derniers analysent le marché, le produit, puis évaluent le rendement, le potentiel, la valorisation, délivrent des chiffres, etc. Ensuite, ils le proposent à leur communauté et à la nôtre, avec une entrée au capital.
Ce type de financement participatif s’est extrêmement professionnalisé au cours de ces dernières années. Par exemple, dans notre cas, cela nous permet d’impliquer la communauté, notamment nos partenaires, nos partenaires technologiques, nos clients et d’autres personnes. C’est ce que l’on appelle du « smart money » et c’est très intéressant. Ce concept permet également d’engager des personnes qui par la suite deviennent ambassadeurs de la solution, car elles ont investi et elles savent que le produit fonctionne. Et donc, elles vont le promouvoir dans leur entreprise, peu importe leur poste (agents, dirigeants ou même CEO).
Notre solution est très agnostique. Nous répondons à des problématiques aussi bien dans la santé que dans l’alimentaire. Partant de là, n’importe quelle personne qui est dans ces milieux peut avoir besoin de Seeqle. Pour nous, c’est un vecteur très important, d’autant plus que nous sommes au stade du seed. La levée de fonds s’élève à 2 M€, c’est le dernier stade où l’on peut encore le faire et le financement participatif en crowdequity le permet largement.
Avez-vous prévu d’étendre votre activité à l’international dans les années à venir ? Si oui, quels territoires souhaitez-vous à présent conquérir ?
Dès le début, la solution a été construite avec une vision internationale. C’est pourquoi nous sommes déjà présents en Amérique du Nord, en Europe et en Afrique, soit dans 8 pays. L’objectif de la levée de fonds, c’est justement d’assoir notre position de leader en France sur le domaine et de s’ouvrir à l’international de façon proactive.
Pour ce qui est des territoires, nous allons renforcer notre présence en France et en Europe de façon globale. Avec un focus UK, Allemagne. Dans un second temps, un focus sur le sud de l’Europe, à savoir : l’Italie, l’Espagne et le Portugal. En parallèle, on commence à toucher un petit peu l’Amérique du Nord.
Quelles sont les difficultés éprouvées par les entrepreneurs du secteur RH ? Comment composez-vous avec ces obstacles ?
De façon globale, nous sommes dans un secteur qui n’est pas facile et qui est assez désuet. Il est constitué d’acteurs présents depuis longtemps et peu sujets à l’innovation. Alors, il y a eu un gros changement ces dernières années. Certes, mais ce n’est pas facile, car bon nombre d’acteurs déjà bien implantés ont du mal à changer leurs habitudes.
La plus grosse difficulté pour nous a été le début. C’était le fait d’arriver les mains vides et de démarcher de grands comptes plutôt que nos pairs startup. En effet, les grandes entreprises qui sont installées ont des process déjà bien définis. Pour la plupart, il faut longtemps avant qu’ils se rendent compte qu’un process ne fonctionne pas et qu’il faut le changer.
Dans l’entrepreneuriat, tout est difficile. Il faut être résilient et persévérant, tout comme il faut être capable de gérer l’humain, ce qui est extrêmement compliqué en entreprise. C’est d’ailleurs la partie la plus complexe, car pendant qu’il est focus sur le business, l’entrepreneur doit penser à ses collaborateurs qui ont leurs problèmes personnels et qui ne sont pas aussi engagés sur le projet que lui. Il lui faut déceler tout cela. C’est pourquoi l’humain est la partie la plus difficile de l’entrepreneuriat.
Quelles sont vos ambitions pour Seeqle ?
Notre ambition est de devenir la typologie universelle d’acquisition candidats pour tous les acteurs du marché. Que ce soit les entreprises, les organismes de formation, les écoles, les universités, les ATS, les cabinets de recrutement, les agences de communication RH, etc. En d’autres termes, tous ceux qui sont de près ou de loin sujets au recrutement peuvent utiliser la solution Seeqle. C’est la raison pour laquelle nous avons une roadmap produit très claire avec une stratégie d’internationalisation rapide. Sans oublier un business model qui fonctionne et une solution qui fournit de la valeur, c’est le plus important.
Quelles leçons retenez-vous de cette aventure entrepreneuriale ?
Nous ne sommes qu’au début de l’aventure et j’ai déjà appris beaucoup de choses. Cela nous a pris 4 ans en tout pour atteindre le niveau auquel nous sommes aujourd’hui. En 2019, nous étions en accélération. En 2020, nous étions à la maison à cause du COVID et nous avons fait deux ans et demi de commercialisation.
Tout d’abord, je pense que l’entrepreneuriat n’est pas fait pour tout le monde. Aussi, lorsqu’on s’y met, il faut y aller à 1000 %. Quoi qu’il se passe, pour moi, il faut avoir une conviction. Et surtout, il faut être capable de se réadapter très rapidement. Pour moi, c’est primordial sinon on est bloqué et rien ne fonctionne. Il faut être à l’écoute, curieux et attentif à ce qui se passe dans son environnement (économique et physique), car on ignore d’où peut venir l’opportunité ou même l’échec. La moindre erreur peut être fatale tout comme la moindre action peut vous propulser.
Nos remerciements à Jean Eudes Yahouedeou, cofondateur et CEO de Seeqle.
Propos rapportés par l’équipe de manager.one