manager.one est allée à la rencontre d’Antoine Sentenac, co-fondateur de Wing, un service logistique sur-mesure idéal pour les e-commerçants.
Cet expert du e-commerce nous livre une analyse fine des problématiques auxquelles sont confrontées les PME présentes sur le web, ainsi que des solutions à y porter. Nous l’avons également interrogé sur son aventure entrepreneuriale.
Pouvez-vous présenter Wing à nos lecteurs ? Qu’est-ce qui a contribué à sa naissance ?
Wing est une solution de logistique e-commerce. Nous avons créé l’entreprise en 2015. L’idée à l’origine était de venir en aide aux e-commerçants de petite taille, classiquement des PME traitant entre 150 et 2 000 commandes par mois sur Internet.
Mon associé Jean-Baptiste Maillant et moi-même tenions une boutique web. Nous avons rapidement constaté qu’il était très compliqué pour les petits e-commerçants de gérer leur logistique en interne. Les transporteurs ne donnent que très peu de remises sur les tarifs transport. Le dépôt des commandes au bureau de Poste est chronophage et contraignant, si bien que les commandes ne sont souvent déposées qu’un jour sur deux. En résulte une expérience logistique beaucoup moins performante que celle des géants du web tels qu’Amazon et Fnac.
Nous avons donc proposé un service au même niveau d’exigence et de qualité qu’Amazon, mais à destination des PME.
Il y a plusieurs années, les marques présentes sur Internet venaient du monde du retail. C’est une donnée moins vraie aujourd’hui car beaucoup d’entreprises se créent sur le web.
Les marques avec des boutiques physiques peuvent conserver leur stock dans leurs propres espaces. Nous leur avons donc proposé de collecter quotidiennement les produits au départ de leur boutique, les emballer et les livrer dans plus de 180 pays du monde. C’est ce que l’on appelle le premier kilomètre. Ainsi, ces entreprises n’ont pas à payer de stockage supplémentaire.
C’est comme ça que l’on a créé l’entreprise en 2015. Nous avons débuté avec les petites entreprises. Nous avons actuellement 300 entreprises clientes.
Mais, progressivement, nous avons commencé à travailler avec des grands comptes, tels que The Kooples ou Zadig et Voltaire. Le service dans ce cas n’est pas le même. Ils n’utilisent pas notre service pour 100 % de leurs expéditions, mais font appel à nous de manière complémentaire.
Nous leur permettons en effet de répondre au problème de l’épuisement des stocks. Lorsqu’un produit marche très bien sur le web, il arrive rapidement en rupture de stock. Plutôt que de stopper la vente du produit en ligne, ils peuvent, grâce à Wing, extraire le produit du stock des boutiques physiques et l’envoyer pour honorer la commande e-commerce. Cela permet de ne pas perdre de ventes en cas d’épuisement, et de toujours répondre à la demande.
On appelle cela la logistique omnicanale : la plupart des commandes partiront de l’entrepôt, mais certaines partiront du magasin.
Wing est donc un acteur complémentaire de la logistique mise en place dans ces grandes entreprises. Après une commande web, le logiciel logistique interroge l’entrepôt. Si le stock est épuisé, il va chercher la pièce dans l’une des boutiques de l’entreprise. Wing intervient alors pour la collecter, l’emballer et l’expédier.
En moyenne, nos clients nous remettent entre 20 et 100 commandes par jour. Avec 300 clients, nous gérons donc entre 5 000 et 10 000 commandes par jour.
Ciblez-vous d’autres types de clientèles ?
Nous travaillons parfois avec le monde corporate, pour des cadeaux d’entreprise. Certaines marques ont besoin de nous de façon ponctuelle, pour expédier un très grand nombre de produits à une multiplicité d’acteurs. Nous sommes capables de faire de la logistique sur-mesure de manière ponctuelle.
Nous travaillons aussi avec des marques en lancement sur les plateformes de crowdfunding. Une fois qu’elles ont fini leur campagne de financement participatif, elles ont souvent des centaines voire des milliers de contreparties à expédier. Elles font appel à nous pour gérer leurs premières expéditions.
Enfin, depuis maintenant six mois, nous avons développé un nouveau service : le e-fulfillment. Il s’adresse aux marques qui n’ont pas de magasin, typiquement les pure players, en leur offrant la possibilité de nous remettre leur stock. Nous le conservons dans un entrepôt spécialement aménagé pour leur activité. Nous préparons les commandes directement, dès qu’elles sont passées sur le site de la marque.
Ce nouveau service nous permet aujourd’hui de proposer une offre à 360° pour le secteur e-commerce.
Quel est votre business model ?
Nous vendons trois services à nos clients.
Le premier, c’est la logistique. Pour du ship from store, cela comprend la collecte, l’emballage et la manutention, pour un coût par commande d’environ 2,5 euros. Pour le service d’e-fullfilment, s’ajoutent à cela le stockage, la réception et la gestion du stock. Le coût est donc plus élevé : environ 3,5 euros par commande.
Ce n’est pas un tarif fixe mais ce sont les prix les plus courants. Le prix peut être amené à varier en fonction des besoins du client, selon qu’il souhaite de la personnalisation ou au contraire une prestation très standard.
Deuxième service : le transport. Nous faisons partir le produit de nos entrepôts jusqu’au client final. Le prix varie nécessairement. Cela s’étend de 4 euros pour livrer en France à domicile jusqu’à plusieurs dizaines voire centaines d’euros lorsque l’on livre à l’autre bout du monde.
On travaille aujourd’hui principalement avec le réseau la Poste, que ce soit Colissimo sur le domicile, ou Chronopost sur l’express. Nous avons ensuite des transporteurs à l’international comme UPS.
Dernier service : un abonnement à la commande (processing fee) qui comprend l’intégration technique avec le site de notre client : intégration API entre son Shopify par exemple et le back-office, pour que toute l’information soit complètement automatisée.
Nous assurons également le service client puisque dès qu’il y a un colis en retard ou un produit cassé, ce sont nos équipes qui prennent le relai pour obtenir un dédommagement ou traiter cette réclamation. Cela représente 20 centimes par commande.
Comment votre activité a-t-elle été impactée lors de la crise du Covid-19 ? Avez-vous mis en place des aménagements spécifiques ?
Notre activité a été particulièrement impactée. Les transporteurs avec lesquels nous travaillons ont pour la plupart réduit de manière très significative la voilure. Pendant plusieurs semaines, la Poste n’a fonctionné que deux jours par semaine.
Nous avons dû adapter notre activité au niveau opérationnel. Nous n’avons ouvert qu’un jour par semaine, pour réduire les coûts.
Le 11 mai a marqué un redémarrage très fort de l’activité. Le confinement a créé une accélération de la croissance du e-commerce, ce qui impacte directement notre activité. Les flux ont ainsi augmenté de 30 à 40 % par rapport à l’avant-crise.
Quelles sont vos ambitions, à moyen et long terme, pour Wing ?
Aujourd’hui, notre service de ship from store est présent dans trois villes : Paris et plus globalement la région Île de France, Marseille, et Lyon.
Notre première ambition est d’étendre notre réseau au niveau national. D’ici la fin de l’année, nous allons nous implanter à Bordeaux et à Lille.
Notre deuxième service, le e-fullfilment, est également un élément clé de notre développement. Nous avons aménagé un entrepôt de 5 000 m2, ce qui nous offre la capacité de prendre beaucoup de flux. C’est le premier entrepôt que nous aménageons de cette façon. Il va nous permettre de faire grandir notre activité.
Notre ambition est enfin de développer notre service dans d’autres pays. Le e-commerce n’est pas qu’un sujet français ! La croissance de ce secteur est au rendez-vous dans de nombreux pays. C’est une logistique qui doit être à la pointe. Nous nous intéressons à des marchés européens proches des nôtres (Espagne, Italie…) mais également au marché américain.
Selon vous, quels sont les factures clés de réussite dans l’entrepreneuriat ? Quels conseils pourriez-vous donner aux personnes souhaitant se lancer ?
Il faut avoir une vraie ambition et une vraie volonté de réussir. Attention à ne pas entreprendre pour les mauvaises raisons. Il faut se concentrer et faire quelque chose de fort et d’impactant pour la société.
Il ne faut pas non plus minimiser le travail à fournir. On a besoin de faire trois fois plus que les autres, car on part de zéro.
L’objectif : avoir de la croissance rapidement. Mais le plus compliqué est d’arriver à avoir une position visible rapidement. Il faut être capable dans les 12 ou 18 premiers mois d’aller chercher cette visibilité, de pénétrer le marché pour pouvoir ensuite intéresser des investisseurs qui vont permettre d’aller encore plus loin.
Il faut taper très vite et très fort. Sinon, au bout de quelques années, on s’essouffle et on perd son énergie.
Nos remerciements à Antoine Sentenac, co-fondateur de Wing.
Propos rapportés par l’équipe de manager.one.