Coronavirus : quid des pertes d’exploitation des entreprises ?

Les pertes d’exploitation des commerçants dues à la crise sanitaire et économique coronavirus atteindraient déjà des dizaines de milliards d’euros. Pourtant, la présidente de la Fédération française de l’assurance le martèle : le secteur ne pourra pas rembourser ces pertes aux entreprises quand elles ne sont pas prévues au contrat.

Certains groupes ont cependant annoncé le 22 avril leur volonté de rembourser les commerçants par « devoir moral ». Finalement, la réponse se fera au cas par cas.

Qu’est-ce que la garantie « perte d’exploitation » des contrats d’assurance ?

Sur un plan juridique, une perte d’exploitation désigne des pertes ou un manque à gagner pour une entreprise. Sur un plan financier, elle représente un résultat d’exploitation négatif.

La garantie perte d’exploitation indemnise le manque à gagner subi par l’entreprise en cas de survenance d’un sinistre mentionné au contrat. La plupart des contrats couvrent ainsi le risque d’incendie, de catastrophe naturelle, de vol ou de bris de machine. La perte d’exploitation est donc principalement associée à un dommage.

La clause perte d’exploitation permet ainsi de compenser une baisse de chiffre d’affaires subie par une entreprise forcée d’interrompre son activité. Elle aide l’entreprise à faire face à ses charges fixes : loyers, impôts, salaires, intérêts d’emprunt… et à relancer son activité dans de bonnes conditions.

Les sommes ainsi obtenues peuvent permettre de remplacer le matériel existant, reconstruire un local, ou encore retrouver une stabilité financière et commerciale.

La garantie perte d’exploitation est utile pour toutes les entreprises dont les locaux, le matériel ou la marchandise sont exposés à des risques de dommages.

Le coronavirus permettra-il d’actionner la garantie perte d’exploitation ?

Mi-avril, les pertes d’exploitation dues au coronavirus en France étaient estimées à 60 milliards d’euros. Les demandes de prise en charge de la part des commerces se sont multipliées ces dernières semaines, à l’aube du déconfinement.

Pourtant, sauf cas de dommage ou de mention spécifique dans le contrat, ces sommes ne seront pas couvertes par les assurances. La clause perte d’exploitation s’appuie généralement sur un dégât matériel, ce qui n’est en principe pas le cas en l’espèce. Le Covid-19 n’est donc pas couvert par la très grande majorité des contrats d’assurance.

Florence Lustman, présidente de la Fédération française de l’assurance (FFA), a ainsi défendu dans un entretien au Figaro l’incapacité du secteur à rembourser aux entreprises ces pertes d’exploitation. Pour elle, cela « reviendrait à mettre le secteur de l’assurance à terre », puisque ces sommes représenteraient « plus que les fonds propres des assureurs non-vie ».

« Nous ne pouvons pas mettre en péril l’argent que les Français nous ont confié, il s’agit en grande partie de leur épargne », a-t-elle fait valoir.

Florence Lustman a cependant souligné les mesures de soutien à l’économie prises par le secteur. Celui-ci devrait investir plus d’1,5 milliard d’euros dans les PME et les ETI, notamment celles du secteur de la santé, « qui ont des besoins criants ». Pour cela, des fonds existants vont rouvrir, tandis que d’autres verront peut-être le jour. La Caisse des dépôts et des consignations assurera la coordination générale de ces investissements.

En outre, les assureurs se sont engagés à verser 400 millions d’euros au Fonds national de solidarité en faveur des petites entreprises et professionnels indépendants. La dotation initiale était de 200 millions d’euros.

Jeudi 14 mai, lors de l’annonce des mesures de soutien pour le tourisme, Bruno Le Maire n’a pas évoqué la prise en charge par les assurances des pertes d’exploitation. Cela résonne comme une amère déception pour les entreprises de ce secteur.

Des gestes commerciaux de la part de certains assureurs

Face à l’inquiétude des commerçants, le Crédit Mutuel a annoncé le 22 avril indemniser à hauteur de 200 millions d’euros les pertes d’exploitation causées par la crise du coronavirus, par « devoir moral ». Sa filiale CIC est également concernée par cette annonce.

Les sommes versées aux assurés correspondront à une estimation forfaitaire de perte de revenus de chaque secteur économique pendant cette période de crise. Cette « prime de relance mutualiste » s’élèvera entre 1 500 et 20 000 euros. Elle sera versée à partir de début mai, financée sur le résultat du groupe et sur ses fonds propres.

Le Crédit Agricole n’a pas tardé à suivre la marche. Il débloquera lui aussi 200 millions d’euros pour indemniser ses assurés. D’autres groupes ont fait des annonces similaires : Société Générale, Axa France, MMA…

Finalement, ces gestes commerciaux devraient atteindre 1,35 milliards d’euros selon les dernières prévisions.

L’actualité évoluant très rapidement ces jours-ci, cet article sera progressivement mis à jour au gré des annonces du gouvernement et nouveautés législatives.

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