Fondée en 2017, Biosency propose une solution novatrice de télésurveillance médicale pour les patients souffrants d’insuffisance respiratoire.
Pour le Journal du Manager, Marie Pirotais, CEO de Biosency partage la création et l’évolution de cette solution.
Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est l’entreprise Biosency ?
Née il y a six ans et demi, Biosency est une start-up apportant des solutions de médecines prédictives pour les patients souffrants d’insuffisances respiratoires.
Nous adressons les pathologies chroniques du système respiratoire. En effet, l’idée est d’améliorer la prise en charge des patients en permettant aux professionnels de santé d’agir en amont et d’anticiper les dégradations de santé de ces patients grâce à cette innovation technologique.
Dans un premier temps, nous avons voulu cibler une pathologie en particulier, peu connue et sous-diagnostiquée : la BPCO.
La BPCO qui est la broncho pneumopathie chronique obstructive est une maladie qui se traduit par une inflammation et une obstruction lente et généralement progressive des bronches.
Dans 80% des cas, elle est liée au tabac, tandis que les 20% restants sont causés par des maladies professionnelles avec la poussière ou la pollution. Selon l’OMS, elle représente aujourd’hui plus de 400 millions de personnes dans le monde. Lorsque nous avons réfléchi au projet de Biosency, la BPCO figurait en 5ème position parmi les principales causes de mortalité mondiale. Cependant, elle est à ce jour la 3ème cause de décès. Cela nous montre à quel point cette maladie a une prévalence en croissance.
Quelle est la particularité de cette maladie ?
La particularité dans cette pathologie, est le fait que les patients fassent des crises qu’on appelle “exacerbation”. Lorsqu’un patient fait une exacerbation, il est hospitalisé en urgence et parfois en réanimation.
Le taux de décès un an seulement après la première crise sévère est de 26%, c’est 65% sur cinq ans. Il s’agit là, d’un enjeu de santé publique majeur en France engendrant plus de 18 000 décès par an. Cette pathologie représente une charge financière significative pour la sécurité sociale avec des coûts s’élevant à 3,5 milliards d’euros annuellement. On comprend alors que cela constitue également un enjeu de santé publique financier.
Par conséquent, nous avons décidé de créer Biosency pour aider ces patients. Nous avons alors développé une solution de télésurveillance basée sur les signes vitaux des patients, capable de prédire les exacerbations dans 86% des cas, jusqu’à 7 jours avant l’hospitalisation. Cela offre la possibilité au médecin d’adapter le traitement lorsqu’il est alerté et d’éviter l’hospitalisation ou de diminuer l’intensité de la crise et/ou la durée de séjour à l’hôpital.
Qu’est-ce que le système Bora care et comment fonctionne-t-il ?
Bora care est une solution complète de télésurveillance pour les patients. C’est un bracelet connecté qui mesure plusieurs facteurs :
- La fréquence respiratoire
- Le taux d’oxygène dans le sang
- Le rythme cardiaque
- L’activité du patient
Ces données sont remontées via une application sur notre plateforme, rendant les informations accessibles aux différents professionnels de santé. À partir de ces signes vitaux, un algorithme spécifique nous permet de prédire les exacerbations chez les patients atteints de la BPCO.
Les insuffisants respiratoires ayant un stade avancé de la pathologie ont des machines d’assistance respiratoire. Ces machines peuvent être des dispositifs d’oxygénothérapie ou des machines de ventilation non invasive.
En outre, nous télésuivons ces machines afin que le médecin puisse veiller à leur utilisation et surveiller les signes vitaux. C’est une solution complète qui permet de suivre le patient à distance et de le maintenir à domicile le plus possible.
Comment avez-vous eu cette idée de projet ?
Tout a commencé autour d’un café à La Rochelle, mon associé Yann Le Guillou et moi-même avions un cabinet de conseil où l’on accompagnait des entreprises innovantes. Nous les conseillions en termes de plan de financement, business plan et marketing stratégique.
Ce jour-là, nous nous sommes retrouvés à discuter avec son frère jumeau Frédéric le Guillou, pneumologue. Il nous a parlé des enjeux de la BPCO et en particulier du fait que lorsqu’il voyait ses patients, il les voyait trop tard et n’avait aucune idée de leur état de santé quand ils étaient à leur domicile. En particulier dans un monde où l’on parle d’intelligence artificielle, d’objets connectés etc. Il regrettait le fait qu’il n’y ait aucun dispositif médical qui lui permette vraiment de suivre ces patients à distance avec des données fiables en quantité suffisante.
Nous avons donc dressé le même constat que Frédéric en se disant qu’il n’y avait pas de dispositif médical et de médecine prédictive pour ces patients. De là, est né Biosency, un projet qui a vu le jour en juillet 2017 après une année de préparation.
Quels sont les objectifs à court et à long terme de votre entreprise ?
Notre objectif à court terme est la mise sur le marché de notre solution de télésurveillance médicale des machines d’assistance respiratoire suite à l’obtention des certificats réglementaires.
Par ailleurs, 2024 est l’année où l’on va bénéficier du remboursement par l’assurance maladie en France du module de télésurveillance des machines. L’enjeu cette année est la croissance en termes de vente et de revenus grâce à ces deux avancées majeures dans notre produit.
À plus long terme, notre objectif est de poursuivre l’enrichissement de notre solution. Nous prévoyons également de traiter d’autres pathologies en restant dans le domaine respiratoire. Nous avons initié des études sur la fibrose, ce qui nous permettra de traiter d’autres patients en intégrant de nouvelles mesures.
À quoi correspondent les certifications HAS/ANS ?
Ce sont les certifications obligatoires pour pouvoir bénéficier d’un remboursement par l’assurance maladie. Elles ont pour rôle de mesurer et d’améliorer la qualité des soins, les accompagnements et la sécurité des patients dans les établissements de santé, services sociaux et médico-sociaux.
Elles sont liées et attestent de la conformité de notre plateforme répondant aux critères de cybersécurité et d’interopérabilité, cela est indispensable.
Pourquoi faire une levée de fonds ?
La levée de fonds est nécessaire lorsque l’on a des produits qui requièrent des développements complexes et du temps, en particulier dans le domaine médical. Notre objectif est d’atteindre la rentabilité grâce à notre chiffre d’affaires.
Actuellement, notre financement provient à la fois du chiffre d’affaires et des levées de fonds, nécessitant toujours ces deux sources.
Comment votre entreprise intègre-t-elle l’innovation et l’intelligence artificielle tel que ChatGPT dans ses opérations et son développement ?
Nous sommes une entreprise qualifiée de « deep tech », spécialisée dans l’innovation avec l’utilisation de l’IA, qui constitue notre ADN. Le cœur de notre produit est basé sur l’IA et le traitement de signal. Nous utilisons des outils comme ChatGPT à la marge et sélectionnons nos outils avec soin pour des raisons de confidentialité.
Quel message souhaitez-vous faire passer avec ceux qui souhaitent entreprendre ?
Réfléchissez bien car c’est un engagement intense et prenant qui peut être stressant cependant, ceci est largement compensé par la richesse apportée. Tous les jours, j’apprends et je suis confrontée à de nouveaux défis, ce qui nourrit énormément en tant que personne.
C’est un métier très difficile mais excessivement riche et cela en vaut la peine. Je pense qu’il faut être soutenu par ses proches car il faut être patient et c’est très engageant.
Quel serait le titre d’un livre basé sur l’histoire de votre entreprise ?
“D’un café à La Rochelle à une innovation de rupture pour une pathologie méconnue”.
Nos remerciements à Marie Pirotais, CEO de Biosency. Propos rapportés par l’équipe de manager.one