Fondée en 2012, CorWave est une société de dispositifs médicaux qui développe des pompes cardiaques innovantes. Sa mission est de réduire le fardeau associé aux DAVG (dispositifs d’assistance ventriculaire gauche) en limitant les événements indésirables liés à la pompe et en réduisant le caractère invasif de la chirurgie.
Pour le Journal du Manager, Louis de Lillers, CEO de CorWave, nous parle de ladite startup et de l’univers de la medtech.
Pouvez-vous nous présenter l’histoire et l’activité de CorWave ?
CorWave a été fondée en 2012 par le « startup studio » MD Start. Nous développons une pompe cardiaque ou LVAD (Left Ventricular Assist Device) révolutionnaire à la technologie disruptive. En d’autres termes, une pompe à membrane ondulante capable de produire un flux sanguin similaire à celui du cœur natif.
Notre mission est d’aider les cliniciens et soignants à sauver les patients en insuffisance cardiaque, une pandémie qui touche 60 millions de personnes dans le monde, et de leur apporter une vie pleinement active.
Depuis sa création, CorWave a obtenu plus de 80 millions d’euros de financement. L’EIC Fund, le fonds de soutien à l’innovation de la Commission européenne, a d’ailleurs pris part à notre dernière levée de fonds de 35 millions d’euros en janvier 2021. Nous sommes aujourd’hui plus de 60 employés installés à Clichy (92), dans notre centre de R&D et de production.
Comment fonctionne la technologie de la membrane ondulatoire mise au point par vos équipes ?
La pompe développée par CorWave repose sur une technologie de rupture : la membrane ondulante. En effet, le LVAD CorWave est inspiré de la nage des animaux marins, qui se déplacent dans l’eau en ondulant. Il contient une membrane souple en polymère qui ondule sur elle-même. La membrane étant fixée à une extrémité, elle ne se déplace pas mais provoque le mouvement du fluide autour d’elle, créant ainsi un débit sanguin.
Notre solution se distingue des dispositifs d’assistance ventriculaire gauche aujourd’hui commercialisés par son fonctionnement physiologique. Elle permettra notamment aux patients de retrouver un pouls et de bénéficier d’un débit sanguin qui s’adapte à leur activité physique.
Quels sont les enjeux et spécificités des entreprises de la medtech ?
Les entreprises de la medtech, et en l’occurrence CorWave, ont notamment des enjeux d’industrialisation. Les startups industrielles font face à des défis spécifiques tant en matière de financement que d’installation de leur outil de production. Il n’aura échappé à personne que la France s’est désindustrialisée ces dernières décennies. Il y a donc de nombreux défis à relever. Toutefois, les pouvoirs publics sont en soutien sur ces thématiques.
Certaines sociétés medtech ont également des problématiques de remboursement. Leur dispositif est tellement innovant qu’il ne s’insère pas facilement dans le parcours de soin et donc les remboursements existants. Or, il est parfois très difficile d’obtenir de nouveaux codes de remboursement. Ce n’est cependant pas le cas de CorWave. Si nous avons développé une technologie de rupture, nous n’allons pas changer les habitudes du personnel hospitalier. Nous pourrons ainsi profiter des codes de remboursement existant : c’est une des grandes forces de notre projet.
Vous avez levé 35 millions d’euros en 2021. À quoi ce montant a-t-il servi ?
Mettre sur le marché une pompe cardiaque nécessite des années de recherche et développement pour s’assurer que le dispositif est sûr et répond aux besoins des patients. Les fonds levés en 2021 financent la fin du développement de la pompe CorWave, l’industrialisation et l’implantation à venir chez les premiers patients.
Quelle est votre place à l’international ?
CorWave est une entreprise à vocation mondiale. L’industrie de pointe des pompes cardiaques est aujourd’hui localisée aux États-Unis, qui est aussi le marché le plus vaste pour notre dispositif. L’Europe est le deuxième marché le plus important à l’échelle mondiale.
Nous avons l’ambition de nous développer d’abord dans ces deux géographies. Nous continuons de grandir pas à pas avec l’ambition de devenir le leader mondial de l’assistance circulatoire. C’est un marché très concentré sur lequel il est possible de prendre rapidement des parts de marché importantes. De plus, le marché de l’assistance circulatoire pèse déjà près d’un milliard de dollars de ventes annuelles.
Quelles sont les difficultés éprouvées par les entrepreneurs de la MedTech ? Comment composez-vous avec ces obstacles ?
Les medtech et plus largement les startups industrielles font face à des défis qui leur sont propres :
- Recruter des talents. Être à la pointe au niveau mondial requiert la mobilisation de compétences très spécifiques et rares. Nous avons besoin d’aller chercher des talents hors de France, pour répondre à nos besoins. Chez CorWave, nous avons accueilli l’année passée deux talents mondiaux pour nous accompagner dans la phase d’essais cliniques et celle d’industrialisation : l’un vient des États-Unis, l’autre d’Australie. Ils seront essentiels au développement de CorWave dans les mois à venir !
- Implanter son outil de production. Nous avons besoin de conserver au sein d’un même site les fonctions de recherche & développement et de production. Le profil des salariés des medtech nous encourage à rester dans des environnements urbains et connectés. Mais aujourd’hui la densité des agglomérations et le coût du foncier rend les espaces d’implantations rares. Nous avons cependant pu trouver un bâtiment adapté aux activités industrielles à Clichy (92) qui est une belle ville dynamique toute proche de Paris.
Que vous apporte votre place au French Tech 120 ? Comment percevez-vous l’écosystème startup en France ?
Nous avons beaucoup de chance d’appartenir au French Tech 120. CorWave est ainsi identifiée comme une des sociétés technologiques les plus prometteuses de France. Cela marque une formidable reconnaissance du travail accompli par nos équipes qui redoublent d’efforts pour améliorer la vie des patients atteints d’insuffisance cardiaque. Plus largement, l’accompagnement et la visibilité qu’apporte la French Tech sont très précieux dans la poursuite de notre ambition : faire de CorWave une medtech d’envergure mondiale.
Quelles sont vos ambitions pour CorWave ?
Aujourd’hui, les pompes cardiaques sauvent des vies, mais elles s’accompagnent d’effets indésirables lourds (AVC, hémorragies, etc.). Notre objectif est double : apporter une solution innovante aux patients atteints d’insuffisance cardiaque avancée pour leur offrir une vie pleinement active, et devenir un leader mondial du marché des pompes cardiaques, ce qui ferait de CorWave une des plus grosses medtech françaises et même européennes.
Auriez-vous des conseils à donner aux lecteurs du Journal du Manager souhaitant se lancer dans l’entrepreneuriat ?
L’entrepreneuriat est une aventure magnifique, très épanouissante mais aussi exigeante avec son lot de risques et d’épreuves. Compte tenu de l’implication demandée, il est utile de passer du temps pour évaluer différentes idées au départ en utilisant une méthodologie rigoureuse qui outre les éléments classiques de business plan (marché, concurrence, produit, finance, PESTEL, etc.) évalue également la valeur ajoutée que l’on peut apporter en tant que porteur de projet : il est crucial de s’impliquer dans un projet où l’on a une valeur ajoutée et où l’on va s’« éclater », le projet doit être en adéquation à des moteurs profonds, cela sera indispensable dans les phases difficiles.
Par ailleurs, je conçois l’entrepreneuriat comme une aventure collective, car par essence une entreprise est une organisation collective même s’il est bien sûr possible d’entreprendre en solo, par exemple en tant que freelance. À noter aussi que l’on peut entreprendre dans une société qui se monte ou qui est en phase de croissance sans être nécessairement le fondateur.
Nos remerciements à Louis de Lillers, CEO de CorWave.
Propos rapportés par l’équipe de manager.one